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Leadership & incertitude : ce que l’entreprise peut apprendre de la montagne, avec Laurence Bret-Stern

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Publié le
15/04/2025
Temps de lecture
7min

Laurence Bret Stern est une pionnière de la tech européenne avec plus de 25 ans d'expérience. Elle a marqué l'histoire de LinkedIn en lançant la branche française en 2010. En 7 ans, elle conquiert 80% des entreprises du CAC 40 comme clients, avant de quitter Londres pour retrouver la montagne. Elle s’installe en 2020 à Chamonix et rejoint Mountain Path aux côtés de Blaise Agresti, l'ancien commandant du PGHM, où elle accompagne dirigeants et entreprises. Elle y fusionne sa passion pour l'alpinisme et son expertise en leadership. Pour Pollen, Laurence analyse les facteurs d’instabilité de notre monde. Elle puise dans l’expérience de la montagne et y tisse des ponts avec le monde de l’entreprise. À l’heure du monde “BANI”, voici ses leçons de leadership pour faire preuve de résilience dans des environnements imprévisibles.

Le monde BANI : nouvelle réalité de l’entreprise

Pendant des années, de nombreux experts ont parlé de monde VUCA (Volatile, Incertain, Complexe, Ambigu) pour expliquer l’imprévisibilité du monde dans lequel nous évoluons.

L’acronyme, issu de l’anglais, est prisé des managers et leaders en entreprises, tantôt source d’opportunité, tantôt vecteur de défis. “D’un monde VUCA, nous sommes progressivement passés à un monde BANI”, raconte Laurence. L’idée est similaire, mais l’acronyme tend davantage vers l’instable.

B pour Brittle, friable. À l’image d’une avalanche, le monde semble fait de couches prêtes à céder à la moindre pression. Celles-ci, insiste Laurence, ne sont pas nécessairement fortes, mais elles suffisent parfois à rompre un équilibre déjà précaire.

A pour ambiguë, comme lors des émeutes en Nouvelle-Calédonie, un drapeau azerbaïdjanais apparaît au milieu de la foule parmi les drapeaux kanak. Le lien n’est pas évident. Les services secrets d’Azerbaïdjan ont infiltré le mouvement indépendantiste, en réaction à la position affichée par la France dans le Haut-Karabakh.

N pour non-linéaire. L’intelligence artificielle en est l’exemple le plus frappant. Son influence exponentielle nous noie dans un flux constant d’informations. Le cerveau humain n’est pas conçu pour gérer une telle somme de données, et ce contexte complexifie encore la prise de décision.

I pour imprévisible. Comme l’issue tout à fait inattendue de la rencontre entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky. Une sortie qui a rompu certains codes politiques historiques.

Alors, comment naviguer dans de telles circonstances ?

Le mythe du sauveur, le choix de l’hyper-contrôle et la panique des élites.

Face à cette incertitude, plusieurs réactions de défense sont observées en entreprise. Mais ces phénomènes sont parfois sources d’erreurs et de dysfonctionnement. En voici trois d’entre eux :

1. Le mythe du sauveur charismatique :

La première, est de se chercher un “sauveur charismatique”, nous explique Laurence qui nous partage une image de Napoléon traversant les Alpes.

“Cette image est intéressante, parce qu’elle illustre parfaitement le contraste entre notre besoin d’héroisme et une réalité souvent moins flamboyante. Napoléon n’a jamais franchi les Alpes de cette façon, mais bien sur un mulet avec une simple couverture.”

Si la figure du leader est essentielle pour naviguer en entreprise, sa glorification peut être source d’erreur. Pour limiter les risques, les méthodes observées dans certaines unités de haute montagne privilégient le recours au collectif. Nous en reparlerons.

Bonaparte glorifié franchissant le Grand-Saint-Bernard

2. Le risque de l’hypercontrôle :

De nombreuses entreprises, en particulier dans l’univers de la tech, tentent de prévoir tous les scenarii possibles. En naviguant ainsi, certaines se noient sous une avalanche de données avec des conséquences parfois contre-productives. “Aujourd’hui, la majorité des entreprises se disent data-driven, explique Laurence. Elles tentent de suivre des paramètres qui sont parfois difficiles à mesurer. Bien que les données sont utiles, il est important d’accepter qu’on ne peut pas tout modéliser”… et qu’il est essentiel de conserver une certaine capacité à affronter l’incertitude.

3. La panique des élites :

Ce phénomène a pu être observé lors de crises majeures comme celle du COVID, nous explique Laurence. En temps de crise, les gouvernements ou les dirigeants d’entreprise projettent souvent leurs propres anxiétés sur la population ou sur leurs équipes, entraînant des décisions radicales (comme l’envoi de l'armée, à la Nouvelle Orléans lors de l’Ouragan Katrina) qui exacerbent la panique plutôt que de la calmer.

Ce que l’entreprise peut appendre de la montagne

Les professionnels de la haute montagne (guides et secouristes) offrent des modèles et exemples précieux. Habitués à prendre des décisions cruciales sous pression dans un environnement largement imprévisible, ils sont les reflets de méthodes de leadership efficaces et résilientes. Quelles leçons tirer de leurs expériences ?

“En situation difficile, la majorité des leaders me disent qu’ils penchent plutôt vers le directif, parce qu’ils estiment qu’ils manquent de temps et doivent agir rapidement.”

Management situationnel et posture de leader

En haute montagne, le guide alterne naturellement entre plusieurs postures de leadership pour atteindre son objectif : le sommet. Et tout comme le manager, ce dernier s’aligne selon la compétence et l’engagement des membres de son équipe. Il valorise la prise d’initiative pour les profils les plus experts et engagés. Il cherche à inspirer les personnalités les moins motivées pour les faire progresser rapidement. ”Si chaque manager dispose d’une posture de leader naturelle, l’enjeu est de la connaitre et de l’adapter au profil de son équipe” affirme Laurence. Comme le guide, qui choisira tantôt de donner le rôle de premier de cordée, ou de rassurer un membre de la cordée.

Développer le corps social : prendre des décisions éclairées dans un contexte ambiguë

Laurence pose souvent la question aux leaders qu’elle accompagne : “Lorsqu’une décision devient difficile ou complexe, comment réagissez-vous ? Êtes-vous plutôt directifs ou consensuels ? ”La majorité me disent qu’ils penchent plutôt vers le directif, confesse-t-elle, parce qu’ils estiment qu’ils manquent de temps et doivent agir rapidement.”

Alors, comment justifier le mode opératoire des secouristes, ou d’acteurs comme le GIGN qui travaillent systématiquement avec des méthodes basées sur le consensus ? Pourquoi des unités spécialisées dans la prise de décision en contexte critique privilégient-elles le collectif ?

Le collectif explique Laurence, est un “vecteur puissant pour limiter la fabrique de l’erreur”. Et pour en maximiser l’efficacité, les secouristes de haute montagne appliquent quelques règles, que nous pouvons facilement adopter en entreprise.

Privilégier le consensus : les secrets d’un collectif qui fonctionne

1. Avoir le bon cercle de décision :

Privilégier un groupe réduit, 5 à 6 personnes par exemple, et des profils qui sont experts du sujet. “Cela n’a rien à voir avec la hiérarchie” insiste Laurence. Ce sont des profils capables d’identifier le problème et de formuler une solution rapidement.

2. Définir l’intention collective :

Quel est l’objectif de votre atelier, de cette réunion, de cette mission ? : “on va faire un sauvetage, mais la priorité est de ramener l’équipe saine et sauve.” L’important est de formuler l’objectif dès le départ, et de s’aligner sur la façon dont il doit être rempli.

3. Choisir le bon format de parole :

Privilégier un format de parole concis en se focalisant sur les éléments et informations clefs, quelques mots, pour aller à l’essentiel.

4. Démarrer par le terrain

Ceux qui sont les plus proches du terrain commencent par s’exprimer. “Généralement, on commence par les plus juniors, estime Laurence car ils ont cette candeur qui leur permet parfois de percevoir les choses différemment”.

5. Le leader parle en dernier

Le leader doit s’exprimer en dernier. Il aura à charge de trancher pour le groupe, mais il ne doit partager sa vision qu’en fin de débat, pour ne pas influencer le groupe.

“Perdre du temps pour gagner du temps”

Se mettre en action en dépit des risques

“Souvent, les organisations demandent à leurs talents d’être agiles tout en se focalisant sur l’opérationnel, ajoute Laurence. Or, quand on met le nez dans l’opérationnel, on ne peut pas prendre de hauteur. C’est pour cette raison qu’il faut s’aligner sur l’intention.”

À nouveau, Laurence puise dans les références extérieures. Les modèles de briefing régulièrement utilisés par l’armée posent toujours un objectif clair à chaque opération de sauvetage. Ils permettent d’aligner les équipes, de mesurer le risque d’erreur et de leur laisser la possibilité de rester agiles, dans la limite des règles fixées. Les secouristes parlent de “perdre du temps pour gagner du temps”.

“En entreprise, c’est pareil, confesse Laurence. Pour devenir une organisation apprenante, évidemment, il faut donner du temps aux gens.”

La prise de décision rapide est un marqueur clé qui différencie les leaders performants. Pionnière de la tech européenne, Laurence Bret Stern a démontré sa maîtrise du leadership décisionnel en quadruplant la base d'utilisateurs de LinkedIn France et en conquérant 80% des entreprises du CAC 40 en 7 ans. Forte de 25 ans d'expérience et de sa passion pour l'alpinisme, elle a co-fondé Mountain Path, fusionnant leadership et résilience en haute montagne. Durant cette session, vous découvrirez comment créer un environnement propice à la prise de décision, développer votre résilience face aux imprévus, et adopter les principes du leadership radical. Une approche unique pour transformer vos défis en opportunités et inspirer vos équipes à embrasser le changement avec confiance.